Friday, June 20, 2008

Moi Maman, toilettes (c'est supposé être un jeu de mots, mais pas nécessairement génial)

(Certaines parties de cette histoire sont vraies. Je vous laisse choisir lesquelles.)

***

Mère indigne -- Vraiment, je suis désolée de m’être emportée tout à l'heure.

Soeur indigne -- Même Nièce indigne t'a entendu crier par le combiné.

Mère indigne -- Écoute, j'haïs vraiment ça être dérangée quand je suis aux toilettes. Je veux dire, avec les enfants, on s'y attend, mais là, Père indigne qui frappe à la porte pour me dire que ma soeur veut me parler au téléphone? C'était, comme, trop.

Soeur indigne -- Je comprends.

Mère indigne – Pourquoi on ne peut pas avoir la paix aux toilettes? Pourquoi? Même les animaux dans la jungle ont le réflexe de s’isoler. Et on les laisse faire. Pourquoi les mères ne peuvent pas être tranquilles?

Soeur indigne -- Mm.

Mère indigne -- C'est pareil chez vous, je peux pas croire.

Soeur indigne -- Mm.

Mère indigne – Écoute ça. L'autre jour, je suis aux toilettes. Concentrée. Et là, Fille Aînée frappe à la porte.

Soeur indigne -- Classique.

Mère indigne -- Bon, c'est déjà beau qu'elle ait frappé au lieu d'entrer et de s'asseoir sur le bord du bain en me fixant jusqu'à ce que j'aie terminé...

Soeur indigne -- Qu'est-ce qu'elle voulait?

Mère indigne – J’en ai tellement marre, si tu savais. Je lui ai demandé si ce qu'elle avait à me dire était vraiment important.

Soeur indigne -- Et?

Mère indigne -- Voyons. Bien sûr que c'était d’une importance ca-pi-ta-le. Ça ne pouvait pas attendre.

Soeur indigne – Elle avait pas déjà ses règles à huit ans?

Mère indigne -- Non. Elle venait d'écouter les nouvelles du sport. Elle voulait savoir ce que “neige synchronisée” voulait dire. Evidemment, le temps que je lui explique, ça m'a perturbée.

Soeur indigne -- Le blocage.

Mère indigne -- Total. Je n'ai pas pu procéder pendant trois jours.

Soeur indigne -- Et Bébé? Elle te fout la paix?

Mère indigne -- C'est pire! Pourtant, j'essaie vraiment d'être décontract. Je m'installe sur la cuvette pendant qu'elle est dans son bain, en me disant qu'au moins, comme elle est déjà dans la salle de bain, je sais à quoi m'attendre.

Soeur indigne -- Mais non.

Mère indigne -- Non. Non seulement elle me regarde fixement elle aussi, mais elle sort du bain et essaie de m'écarter les jambes pour vérifier où j’en suis. Et si j’ai le malheur de faire un numéro 2, il faut que je lui donne un nom.

Soeur indigne -- Fuck.

Mère indigne -- Fais-moi plaisir, appelle jamais ton chat «Ti-Brun».

Soeur indigne -- En tout cas, moi, j'ai réglé le problème. Je verrouille la porte.

Mère indigne -- Comment tu fais? Suffit qu'ils entendent le "clic" pour que toute la maisonnée soit soudain prise d'une envie irrépressible.

Soeur indigne -- Non. Plus chez nous. Pour les toilettes, j'ai adopté l'approche “tough on crime”. T'as envie quand j'occupe la place, tu vas ailleurs. On a trois salles de bain, c’est pas comme si je leur demandais d’aller faire ça dans la cour .

Mère indigne – Et ça marche?

Soeur indigne -- Ils se débrouillent. Et j'ai la paix. En fait, je dois dire que maintenant, c'est aux toilettes que je conduis la plupart de ma business.

Mère indigne -- Euh... C’est-à-dire...?

Soeur indigne -- J'amène le téléphone et mon ordi avec moi, je verrouille la porte, et je prends un grand respir. Je peux rester là deux heures.

Mère indigne -- Tu me niaises? Et Beauf' adoré? Il est d'accord?

Soeur indigne -- Tony fait pareil. D'ailleurs, je suis aux toilettes en ce moment même.

Mère indigne -- J'hallucine. Tu me parles au téléphone assise sur la bol.

Soeur indigne --Si je ne te l’avais pas dit, tu ne l’aurais jamais su. Faut juste que je fasse attention de ne pas flusher quand je suis au téléphone avec un client. Remarque, Tony le fait régulièrement et ses affaires ne se sont jamais mieux portées. Je pense que notre société est vraiment sur la pente descendante.

Mère indigne -- Seigneur. Et les filles?

Soeur indigne – Tony et moi, on prend nos tours de toilettes. Pour le moment, Tony s'en occupe. Il me reste encore un bon 15 minutes avant de lui céder la place.

Mère indigne -- Tu, euh, ne manques jamais de papier de toilettes?

Soeur indigne -- C’est drôle que tu en parles. C’est arrivé la semaine dernière en pleine gastro, alors on a fait le plein chez Cosco. Rouleaux doubles. Les armoires des trois salles de bain sont remplies à pleine capacité.

Mère indigne -- Et t'as ton ordi avec toi, là, là?

Soeur indigne -- Mon laptop. C’est vraiment génial. Dans un petit endroit clos comme ça, j’ai l’impression de me retrouver dans l’utérus de Maman, mais avec tout le côté pratique de la techno. D’ailleurs, tiens! Je viens de te poker sur Facebook.

Mère indigne -- Tu viens de me... J'ai mon voyage. C’est ce qui s’appelle avoir le wireless collé aux fesses.

Soeur indigne -- Ah, shit.

Mère indigne -- Non, s’il-te-plaît. Too much information.

Soeur indigne -- Non, non, c'est pas ça.

Mère indigne -- Quoi?

Soeur indigne -- Tony vient aussi de me poker sur Facebook. Il doit être dans la salle de bain à l'étage. Le maudit. Je pensais qu'il s'occupait des filles. Attends, je vais le skyper.

Boop! Boop! Boop!

(Bon, résumons, voulez-vous? On s’amuse tellement qu’on pourrait s’y perdre : Mère indigne, via son téléphone cellulaire, s’apprête à épier une conversation Skype entre sa soeur et Beauf’ adoré.)

Soeur indigne -- Chéri?

Beauf’ adoré -- Ouais?

Soeur indigne -- Comment ça tu me pokes?

Beauf’ adoré – Ben, quoi. J’aime pas ça perdre l’avantage du poke.

Soeur indigne – Je veux bien, mais les filles? Tu t’en occupes?

Beauf’ adoré – Pas vraiment. Je suis aux toilettes en haut.

Soeur indigne – Je vois bien!

Beauf’ adoré – Il est 4 heures. Ton tour de toilettes est fini.

Soeur indigne -- Tu pourrais me prévenir! Où sont les filles?

Beauf’ adoré – Euh... Écoute, faut je te laisse. J’ai vraiment envie.

Soeur indigne -- Mais où sont les fiiiilles??

Il s’avéra que les deux nièces de Mère indigne, suivant l'exemple de leurs parents, avaient investi la troisième salle de bain, celle du sous-sol. Par contre, boudant résolument la techno, elles s’étaient consacrées à une tâche manuelle et beaucoup plus terre-à-terre consistant à bourrer systématiquement la cuvette avec des rouleaux doubles de chez Cosco.

Moi, ensuite, j’ai fait une recherche sur Google, et c’est écrit noir sur blanc : on est toujours puni par où on a poké.

Sunday, June 15, 2008

Les vacances d'été

Dernière chronique radiophonique de la saison, diffusée à l'émission Nulle part ailleurs (Radio-Can, Sudbury). Elle sera en format audio sur le site de la station d'ici quelques jours.

***

Moi, je dois vous dire franchement, en tant que parent, je ne crois plus tellement au sens du mot « vacances » dans l’expression « vacances d’été ».

Suffit de traîner un peu sur Internet pour constater à quel point on vit dans un monde rempli de détresse. La question « que faire pendant les vacances avec les enfants », qui revient des milliers de fois dans les forums de discussion, nous révèle tout l’ampleur de l’angoisse humaine, et plus précisément de l’anxiété parentale à l’aube de la saison du Dairy Queen. Surtout qu’en général, c’est dès le 3e jour qu’on devra faire face à la phrase fatidique : « J’ai rien à faire. »

Pour les gens comme moi, qui passeraient des mois entiers à lire des romans policiers et qui sont donc confrontés au vide intersidéral lorsque vient le moment d’avoir des idées d’activités en famille, il est très normal de demander de l’aide sur Internet. Mais est-ce qu’on la trouve?

Malheureusement, il suffit de faire une brève incursion sur des sites soi-disant pratiques pour voir qu’en fait, ils ne nous sont d’aucune utilité. Une chronique destinée à donner des idées aux parents nous invite, par exemple, à adopter un « code de vie des vacances ». On nous propose des règles aussi alléchantes que « Chaque vacancier doit se coiffer différemment chaque jour ». Mais bon sang, chacun sait que les parents ne se coiffent plus depuis belle lurette, et encore moins en vacances!

Un autre de ces sites sataniques nous propose de ne pas aller au lit avant d’avoir chacun attrapé deux lucioles. C’est plus qu’une idée ridicule, c’est une infamie! Premièrement, pourquoi serait-il acceptable de jouer avec la vie de pauvres lucioles? Imaginez si on nous conseillait, à la place des lucioles, d’attraper chacun deux petits bébés phoques sur la banquise? Appelez-moi la Brigitte Bardot des lucioles, mais je m’objecte farouchement à leur chasse, et surtout à l’utilisation de leur fourrure pour fabriquer sacs de couchage. On pourrait pas dormir avec toute la lumière. Et deuxièmement, le but est de COUCHER les enfants TÔT, pas de les envoyer s’exciter pour qu’ils reviennent en réclamant encore plus de guimauves grillés. Il faudrait au contraire leur inculquer la hantise des lucioles, pour qu’ils aillent eux-mêmes se cacher dans leur lit dès qu’ils en aperçoivent les premières lueurs.

Et dans d’autres sites horriblement culpabilisants, on nous exhorte à ne pas parler de l’école pendant les vacances, sous prétexte que cela pourrait traumatiser nos pauvres petits n’enfants, leur rappeler qu’ils vont être obligés de retourner en septembre dans ces sombres endroits où ils devront (horreur!) apprendre des choses. Bon, moi je veux bien, mais est-ce qu’on peut quand même se parler de l’école entre parents, pour se dire à quel point on a hâte qu’elle recommence?

Non, mes chers parents. Inutile d’espérer une quelconque aide du cyberespace. Nous sommes seuls au monde.

Ceci dit, et puisque vous m’êtes sympathiques, j’ai décidé de partager avec vous seuls quelques idées qui m’ont été inspirées par ce thème estival.

Tout d’abord, et bien que la tentation puisse être grande, je vous déconseille de perdre vos enfants en forêt avant de partir pour deux semaines à Miami. Premièrement, nos enfants aujourd’hui sont très précoces et malheureusement, ils connaissent déjà leur adresse par coeur dès l’âge de 3-4 ans. En plus ils peuvent appeler le 911 à partir du cellulaire de Dora que leur parrain leur a offert pour Noël. Une poursuite policière sur la 40 avec vos enfants qui pointent votre voiture du doigt du haut de l’hélicoptère est certes une manière enlevante de commencer des vacances, mais aussi de les terminer un peu trop rapidement.

J’ai par contre devisé un plan ingénieux pour assurer à votre couple un bref moment d’intimité pendant les vacances. Vous mettez les enfants dans un avion en partance pour l’Australie, avec un papier assurant qu’ils vont rejoindre leur grand-maman. Vous vous reposez pendant 3 ou 4 jours, le temps que la compagnie aérienne se rende compte que personne, pas même un kangourou, n’attend votre marmaille à Sydney et ne vous les rapatrie vite fait. Vos enfants, seront ravis de l’aventure, et vous aussi, puisque vous rentrerez à la maison avec les bouteilles de gin que vous leur aurez demandé d’acheter à la boutique hors taxe. Vous quitterez tous ensemble l’aéroport en rigolant et au pas de course, et comment mieux terminer cette épopée que par une autre poursuite policière sur la 40? Car malheureusement, les forces de l’ordre n’ont parfois pas le même sens de l’humour que les parents au bord de la crise de nerfs.

Mais après de multiples essais et erreurs, je pense avoir trouvé LA solution au problème des vacances. En tout cas, des miennes. Ça m’est venu en allant chercher du lait au dépanneur plus tôt aujourd’hui, et – oh! Justement, Père indigne vient de m’envoyer un texto à ce sujet : « quand reviens-tu du dépanneur, toi partie depuis 2 heures ». Juste un moment, chers amis, je lui réponds : « Chéri, plus de lait au dépanneur, moi partie à Bora-Bora acheter du lait de vaches heureuses. Retour dans trois semaines avec un 2 litres, signé, ton épouse aimante ». Hiiiiiiiiiiii!

Bon, mon avion est sur le point de s’envoler vers le Pacifique, alors je me dépêche de vous souhaiter à tous de fabuleuses vacances d’été avec les enfants, que vous aimez malgré tout, n’est-ce pas? Surtout les vôtres.

***

(Tiens, je me relis et je me dis que j'exagère sans doute, comme d'habitude... Si vous connaissez des sites Internet avec des idées intéressantes pour les vacances, ou que vous avez vous-mêmes des trucs éprouvés d'activités familiales, ne vous gênez pas pour nous donner vos idées et références dans les commentaires!)

Thursday, June 05, 2008

Surprises et autres singeries

Après quatre jours d'un cruel éloignement, Mère indigne rentre d'un voyage à Vancouver et se prépare à accueillir, au creux de ses bras aimants, les membres de sa famille désemparés par une si longue absence.

Mère indigne -- Mes chéris! C'est moi! Je le sais, vous avez tant souffert. Venez vous réfugier dans mes bras accueill-

Bébé -- MA SUPIIIIZE!

Mère indigne -- Ta...?

Bébé -- VEUX MA SUPIIIIZE!

Père indigne -- Elle veut son cadeau. Tu lui avais promis une surprise avant de partir.

Mère indigne -- Oui, bon. Viens ici, Bébé. Viens me donner un bisou. Après, je vais te donner ta-

Bébé -- SUPIIIZE! AAAAAAAAAAAAAAAHHHHHHHMAVEUXMASUPIIIIZEÀMAAAA!

Fille Aînée -- Maman?

Bébé -- Supize?

Mère indigne -- Ah, ma grande chérie! Tu viens me faire un gros câ--

Fille Aînée -- Euh, oui, Maman, c'est parce que, t'as une imprimante couleur à ton travail?

Mère indigne -- Ben... oui. Mais tu viens me donner un bis-

Fille Aînée -- C'est parce que c'est pour ma présentation sur les orang-outangs. J'ai besoin d'images.

Bébé -- Supize, Maman?

Mère indigne -- Oooooké, des images d'orang-outangs. C'est noté. Gros bis--?

Fille Aînée -- Et j'ai aussi besoin que tu trouves la réponse à une question très importante sur les orang-outangs.

Mère indigne -- Une question très importante. Sur les orang-outangs.

Fille Aînée -- Oui. Ça concerne l'âge de leur maturité sexuelle.

Bébé -- Supize!

Mère indigne -- L'âge. De leur maturité sexuelle.

Fille Aînée -- C'est parce que j'ai oublié si c'est à 4 ans ou à 6 ans qu'ils deviennent matures sexuellement.

Mère indigne -- Tu sais c'est quoi, la maturité sexuelle?

Fille Aînée -- Ben! C'est l'âge où le pénis pousse.

Bébé -- SUPIZESUPIZESUPIZE!!!

Mère indigne -- L'âge où le... D'accccooooooord.

Fille Aînée -- Si t'as des photos de ça, tu les imprimes.

Mère indigne, s'imaginant la gueule de Madame Nadia quand Fille Aînée va faire sa présentation en classe -- Non, je ne pense pas non. Tiens, Bébé, ta surprise.

Bébé -- MA SUPIIIIZE! Massi Maman.

Mère indigne -- Tu me donnes un beau bisou, là?

Bébé -- Va-t-en.

Mère indigne, au désespoir, se tournant vers Père indigne -- Toi, chéri, au moins, tu es content de me voir?

Père indigne -- Tu parles. J'arrivais justement à ma maturité sexuelle. Ça pousse, je le sens.

Mère indigne -- Oh! Une supize? Pour moi?

Père indigne -- Après ces retrouvailles difficiles avec nos enfants, tu le mérites bien.

Mère indigne -- Merci, chéri... Je suis rassurée de savoir que je ne suis pas pour toi qu'un simple instrument que tu prévois utiliser selon ton bon vouloir. Que je possède vraiment une dignité intrinsèque en tant qu'être humain digne de respect.

Père indigne -- Hé hé.

Mère indigne -- Chéri, je blague. Je ne suis pas dupe. Mais je suis une femme pleine de sagesse, et je sais qu'on doit accepter ce qu'on ne peut changer. Sers-moi une vodka-orange et je resterai votre esclave pour l'éternité.

Mère indigne sirota sa vodka-orange en se disant tout de même qu'un jour, elle finirait bien par les avoir.